Olivier Guez

De Franse schrijver,  essayist en journalist Olivier Guez werd geboren op 15 juni 1974 in Straatsburg. Zijn grootmoeder van moederskant liet hem op zeer jonge leeftijd kennismaken met lezen. Guez studeerde aan Sciences Po Strasbourg, de London School of Economics en het College of Europe. Hij werkte als freelance journalist voor The New York Times, Le Monde, de Frankfurter Allgemeine Zeitung, Le Figaro Magazine, L’Express, Le Point, Politique Internationale, Der Freitag, Der Tages Anzeiger, Das Magazin en Il Foglio. Tussen 2000 en 2005 werkte hij als verslaggever bij de afdeling Internationale Economie van La Tribune. Hij schreef enquêtes en rapporten over Centraal-Europa, Latijns-Amerika, het Midden-Oosten, de Europese Unie en de geopolitiek van olie. Hij schreef zijn eerste boek, La Grande Alliance, in samenwerking met Frédéric Encel, In 2017 schreef hij een biografische roman “La Disparition de Josef Mengele”,  (bekroond met de Prix Renaudot). Het documenteert Josef Mengele (1911-1979), nazi-Duitse officier, oorlogsmisdadiger die als arts werkte in Auschwitz. “La Disparition de Josef Mengele” was een van de acht romans in de tweede selectie voor de Prix Goncourt 2017.

Uit: La disparition de Josef Mengele

“Toujours élégamment vêtu et d’humeur badine, Gregor jouit d’une bonne réputation au sein de la communauté allemande de Buenos Aire. Considéré comme une pointure intellectuelle, il ponctue ses phrases de citations de Fichte et de Goethe. Les femmes louent sa courtoisie presque cérémonieuse et sa culture germanique remarquable. Dans la communauté, il n’y a qu’un homme sur lequel son charme n’opère pas. Sassen le lui a présenté un jour que Gregor déjeunait à l’ABC, dans son box habituel, sous le blason de la Bavière. Lorsqu’il a salué ce type dégarni et mal fagoté, il a su immédiatement qu’ils ne pourraient pas s’entendre. La main de Ricardo Klement était moite, son regard oblique, protégé par d’épaisses lunettes de guingois.
Ce jour-là, Sassen n’a pu s’empêcher de révéler aux deux intéressés leur véritable identité. Adolf Eichmann, je vous présente Josef Mengele ; Josef Mengele, voici Adolf Eichmann. Au second, le nom du premier ne dit rien. Des capitaines, des médecins SS, le grand ordonnateur de l’Holocauste en a croisé des centaines et des milliers. Mengele est un exécuteur des basses œuvres, un moustique aux yeux d’Eichmann qui le lui fait bien sentir, lors de cette première rencontre, prenant soin de lui rappeler son éblouissant parcours au sommet des arcanes du Troisième Reich, le poids écrasant de ses responsabilités, sa puissance : « Tout le monde savait qui j’étais! Les juifs les plus riches me baisaient les pieds pour avoir la vie sauve. »

Avant de gagner l’Argentine, Eichmann s’est lui aussi caché dans une ferme, au nord de l’Allemagne. Il y a travaillé comme forestier et élevé des poulets. Ensuite, à Tucumán, il a dirigé une équipe d’arpenteurs et de géomètres de la Capri, l’entreprise d’État fondée par Perón pour recycler ses nazis et construire, éventuellement, des usines hydroélectriques. En 1953, la Capri a fait faillite ; Eichmann, son épouse et leurs trois garçons se sont installés à Buenos Aires, rue Chacabuco, dans le quartier d’Olivos.
Gregor s’emploie à éviter les Klement mais depuis qu’il a emménagé dans le même quartier début 1954, une belle maison mauresque en rez-de-jardin, 1875 rue Sarmiento, il les rencontre souvent, les gamins notamment, toujours accoutrés en gauchos, comme un jour de carnaval. Eichmann est une bête de foire, conviée aux réunions à bord du Falken et aux parties de campagne chez Menge, la nazi society semble envoûtée par son aura maléfique. Lorsque Sassen lui parle, on dirait qu’il accède à Himmler, à Goering et à Heydrich réunis dont Eichmann se vante d’avoir été l’intime. Partout où il va, dans les cercles nazis, Eichmann s’enivre, joue du violon, fait son cinéma.”

 

Olivier Guez (Straatsburg, 15 juni  1974)

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