Marc Dugain

De Franse schrijver en filmmaker Marc Dugain werd geboren op 3 mei 1957 in Senegal, waar zijn vader werkzaam was. Hij keerde terug naar Frankrijk toen hij 8 jaar was en bracht zijn jeugd door bij zijn grootvader (Eugene Fournier) in het chateau waar de soldaten met een verminkt gezicht tijdens WO I opgevangen werden. Dit zou de bron van zijn eerste roman zijn: “La Chambre des officiers” uit 1998. Hij studeerde af aan het Grenoble Instituut voor Politieke Studies en behaalde een diploma registeraccountant. Hij werkte in de financiële wereld en richtte een bedrijf op, gespecialiseerd in de financiering van de transportwereld. Hij werd een succesvol ondernemer in de luchtvaart en stond aan het hoofd van Proteus Airlines en Flandre AIR2. Op zijn vijfendertigste begon hij een literaire carrière door het vertellen van het lot van zijn grootvader van moederszijde. “La Chambre des officiers” werd verfilmd door François Dupeyron in 2001 met Eric Caravaca, André Dussollier en Sabine Azéma in de hoofdrollen. In 2000 verscheen “Campagne anglaise” over de eenzaamheid en de zoektocht naar liefde van een Engelse zakenman. In 2002 “Heureux comme Dieu en France”, een verhaal over het verzet, in 2005 “La Malédiction d’Edgar”, over het leven van John Edgar Hoover, in 2007 “Une exécution ordinaire sous Staline” over de ramp met de onderzeebootKoersk. In 2008 volgde “En bas, les nuages”, een verzameling van korte verhalen.

Uit: La Chambre des officiers

« La guerre de 14, je ne lʼai pas connue. Je veux dire, la tranchée boueuse, lʼhumidité qui transperce les os, les gros rats noirs en pelage dʼhiver qui se faufilent entre des détritus informes, les odeurs mélangées de tabac gris et dʼexcréments mal enterrés, avec, pour couvrir le tout, un ciel métallique uniforme qui se déverse à intervalles réguliers comme si Dieu nʼen finissait plus de sʼacharner sur le simple soldat.
Cʼest cette guerre-là que je nʼai pas connue.
Jʼai quitté mon village de Dordogne le jour de la mobilisation. Mon grand-père a
couvert ma fuite de la maison de famille dans le silence du petit matin, pour éviter dʼinutiles effusions. Jʼai chargé mon paquetage dans la carriole du vieil André. A la cadence du balancement de la croupe de sa jument brune, nous avons pris la direction de Lalinde. Ce nʼest que dans la descente de la gare quʼil sʼest décidé à me dire : “Ne pars pas trop longtemps mon garçon, ça va être une sacrée année pour les cèpes.”
A Lalinde, une dizaine de petits moustachus endimanchés dans leur vareuse se laissaient étreindre par des mères rougeaudes, en larmes. Comme je regardais le vieil André sʼéloigner, un gros joufflu aux yeux comme des billes sʼest approché timidement de moi.
Cʼétait Chabrol, un gars de Clermont-de-Beauregard que je nʼavais pas revu depuis la communale. Il était là, seul, sans famille, sans adieux. Il redoutait de prendre le train pour la première fois, sʼinquiétait des changements. Pour se rassurer, il tirait à petites gorgées sur une gourde accrochée à sa ceinture. Cʼétait un mélange dʼeau- de-vie de prune et de monbazillac. Il en avait trois litres dans son sac, trois litres pour trois semaines de guerre, puisquʼon lui avait dit quʼon leur mettrait la pâtée en trois semaines, aux Allemands. Ce gros communiant qui sentait un drôle de vin de messe sʼinstalla à côté de moi pour ne plus me quitter des yeux. »

 
Marc Dugain (Senegal, 3 mei 1957)