De Franse schrijver André Gide werd geboren op 22 november 1869 in Parijs. Zie ook mijn blog van 22 november 2006 en ook mijn blog van 22 november 2007 en ook mijn blog van 22 november 2008 en ook mijn blog van 22 november 2009.
Uit: La symphonie pastorale
“Mais je crois inutile de noter ici tous les échelons premiers de cette instruction qui, sans doute, se retrouvent dans l’instruction de tous les aveugles. C’est ainsi que, pour chacun d’eux, je pense, la question des couleurs a plongé chaque maître dans un même embarras. (Et à ce sujet je fus appelé à remarquer qu’il n’est nulle part question de couleurs dans l’Évangile.) Je ne sais comment s’y sont pris les autres ; pour ma part je commençai par lui nommer les couleurs du prisme dans l’ordre où l’arc-en-ciel nous les présente ; mais aussitôt s’établit une confusion dans son esprit entre couleur et clarté ; et je me rendais compte que son imagination ne parvenait à faire aucune distinction entre la qualité de la nuance et ce que les peintres appellent, je crois, « la valeur ». Elle avait le plus grand mal à comprendre que chaque couleur à son tour pût être plus ou moins foncée, et qu’elles pussent à l’infini se mélanger entre elles. Rien ne l’intriguait davantage et elle revenait sans cesse là-dessus.
Cependant il me fut donné de l’emmener à Neuchâtel où je pus lui faire entendre un concert. Le rôle de chaque instrument dans la symphonie me permit de revenir sur cette question des couleurs. Je fis remarquer à Gertrude les sonorités différentes des cuivres, des instruments à cordes et des bois, et que chacun d’eux à sa manière est susceptible d’offrir, avec plus ou moins d’intensité, toute l’échelle des sons, des plus graves aux plus aigus. Je l’invitai à se représenter de même, dans la nature, les colorations rouges et orangées analogues aux sonorités des cors et des trombones, les jaunes et les verts à celles des violons, des violoncelles et des basses ; les violets et les bleus rappelés ici par les flûtes, les clarinettes et les hautbois. Une sorte de ravissement intérieur vint dès lors remplacer ses doutes :
– Que cela doit être beau ! répétait-elle.
Puis, tout à coup :
– Mais alors : le blanc ? Je ne comprends plus à quoi ressemble le blanc…
Et il m’apparut aussitôt combien ma comparaison était précaire. – Le blanc, essayai-je pourtant de lui dire, est la limite aiguë où tous les tons se confondent, comme le noir en est la limite sombre. – Mais ceci ne me satisfit pas plus qu’elle, qui me fit aussitôt remarquer que les bois, les cuivres et les violons restent distincts les uns des autres dans le plus grave aussi bien que dans le plus aigu. Que de fois, comme alors, je dus demeurer d’abord silencieux, perplexe et cherchant à quelle comparaison je pourrais faire appel.”
André Gide (22 november 1869 – 19 februari 1951)
Portret door Jacques Emile Blanche, 1912
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