De Franse schrijver Laurent Binet werd geboren in Parijs op 19 juli 1972. Binet is de zoon van een historicus en studeerde literatuur in Parijs. In 1996 deed hij vervangende dienstplicht in Košice, Slowakije, waar hij Frans doceerde aan een luchtmachtschool. Sindsdien is hij leraar moderne literatuur in Parijs en werkt hij ook aan de Universiteit van Vincennes Saint-Denis. In 2000 publiceerde Binet zijn surrealistische vertelling “Forces et faiblesses de nos muqueuses” (sterke en zwakke kanten van onze slijmvliezen) en in 2004 verscheen zijn boek “La Vie professionnelle de Laurent B.” (Het beroepsleven van Laurent B), over zijn ervaringen als docent Frans. Internationale bekendheid verwierf Binet met zijn debuutroman “HHhH” (acroniem voor ‘Himmlers Hirn heißt Heydrich’) uit 2010, zich afspelend binnen het Tsjechische verzet in WO II, cumulerend in de aanslag op SS-leider Reinhard Heydrich in 1942. Voor dit werk kreeg hij de ‘Prix Goncourt du premier roman’ toegekend. De Nederlandse vertaling door Liesbeth van Nes verscheen in 2011. In 2012 verscheen zijn boek “Rien ne se passe comme prévu” (Nederlands: Niets gaat zoals werd verwacht), over de verkiezingscampagne van François Hollande, in 2015 “La septième fonction du langage” (Nederlands: De zevende functie van de taal), een roman die speelt met werkelijkheid en fictie, tevens een satire op het intellectuele discours van het Franse poststructuralisme.
Uit: HHhH
“Il y avait les traces encore terriblement fraîches du drame qui s’est achevé dans cette pièce voilà plus de soixante ans : l’envers du soupirail aperçu de l’extérieur, un tunnel creusé sur quelques mètres, des impacts de balles sur les murs et le plafond voûté, deux petites portes en bois. Mais il y avait aussi les visages des parachutistes sur des photos, dans un texte rédigé en tchèque et en anglais, il y avait le nom d’un traître, il y avait un imperméable vide, une sacoche, un vélo réunis sur une affiche, il y avait bien une mitraillette Sten qui s’enraye au pire moment, il y avait des femmes évoquées, il y avait des imprudences mentionnées, il y avait Londres, il y avait la France, il y avait des légionnaires, il y avait un gouvernement en exil, il y avait un village du nom de Lidice, il y avait un jeune guetteur qui s’appelait Valcik, il y avait un tramway qui passe, lui aussi, au pire moment, il y avait un masque mortuaire, il y avait une récompense de dix millions de couronnes pour celui ou celle qui dénoncerait, il y avait des capsules de cyanure, il y avait des grenades et des gens pour les lancer, il y avait des émetteurs radio et des messages codés, il y avait une entorse à la cheville, il y avait la pénicilline qu’on ne pouvait se procurer qu’en Angleterre, il y avait une ville entière sous la coupe de celui qu’un surnommait « le bourreau », il y avait des drapeaux à croix gammée et des insignes à tête de mort, il y avait des espions allemands qui travaillaient pour l’Angleterre, il y avait une Mercedes noire avec un pneu crevé, il y avait un chauffeur, il y avait un boucher, il y avait des dignitaires autour d’un cercueil, il y avait des policiers penchés sur des cadavres, il y avait des représailles terribles, il y avait la grandeur et la folie, la faiblesse et la trahison, le courage et la peur, l’espoir et le chagrin, il y avait toutes les passions humaines réunies dans quelques mètres carrés, il y avait la guerre et il y avait la mort, il y avait des Juifs déportés, des familles massacrées, des soldats sacrifiés, il y avait de la vengeance et du calcul politique, il y avait un homme qui, entre autres, jouait du violon et pratiquait l’escrime, il y avait un serrurier qui n’a jamais pu exercer son métier, il y avait l’esprit de la Résistance qui s’est gravé à jamais dans ces murs, il y avait les traces de la lutte entre les forces de la vie et celle de la mort, il y avait la Bohême, la Moravie, la Slovaquie, il y avait toute l’histoire du monde contenue dans quelques pierres.”
Laurent Binet (Parijs, 19 juli 1972)