De Franse schrijfster Mazarine Pingeot werd geboren in Avignon op 18 december 1974. Zie ook mijn blog van 18 december 2008 en ook mijn blog van 18 december 2009 en ook mijn blog van 18 december 2010.
Uit: Pour Mémoire
„Mes parents ont été arrêtés devant mes yeux. Je m’étais éloigné de la route, avec mon frère, sur le chemin de la Croix-aux-filles, pour ramasser des fraises sauvages. Une voiture a vrombi, au loin, de plus en plus proche, puis elle a ralenti. Nous nous sommes tus. J’ai entendu mes parents crier. Je n’ai pas compris leurs mots, mais ils étaient à notre intention, une intention secrète.
Ces derniers mois nous avions élaboré des messages codés (« éloignez-vous », « nous sommes pris », se traduisaient par « Attention mon chapeau » et « Doucement, vous me faîtes mal » ou n’importe quelle variante qui se serait ajustée à la situation). On avait jugé inutile ou irréaliste d’ajouter « J’ai perdu ma chaussure » pour « Je vous aime mes enfants chéris, pensez à moi, ne vous inquiétez, pas notre amour survivra », et toutes ces phrases tristes que je me répétais d’avance dans mes nuits de silence en tenant la main de ma mère. Elle, elle gardait sa peur pour elle, mais ses lèvres se mettaient à trembler dès que des pas résonnaient dans la cage d’escalier et nous tachions de ne pas bouger. Nous attendions, nous attendions que les choses changent, ou peut-être nous attendions notre arrestation.
Ma mère a crié et je n’ai pas saisi ses mots, ce que j’ai saisi c’est : « Restez là où vous êtes, cachés derrière les arbres. » Peut-être y avait-il aussi un adieu dans ses cris, « Je vous aime, pensez à moi lorsque vous serez grands », mais ses cris ont été recouverts par ceux de mon père : « Ne touchez pas à ma femme, laissez-la, elle n’est pas vraiment juive. » C’est la dernière parole que j’ai entendue. Pas vraiment juive. Toujours ce souci d’exactitude chez lui.“
Mazarine Pingeot (Avignon, 18 december 1974)
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